RAMIRO (E.) Illustrations de Louis LEGRAND. Faune parisienne.

 

Avec Faune parisienne, nous avons un ouvrage léger et pétillant reflet d’une époque brillante avec deux de ses représentants, l’auteur, l’avocat Eugène Rodrigues plus connu en bibliophilie sous le pseudonyme d’Erastène Ramiro et l’illustrateur talentueux Louis Legrand.

Eugène Rodrigues Henriquez descend d’une lignée d’exilés portugais chassés par l’Inquisition au XVIe siècle, une des branches de ses ancêtres s’installe à Bordeaux avant de rejoindre la capitale. Il naît à Paris en 1853, embrasse une carrière juridique et devient bâtonnier de l’ordre des avocats parisiens en 1911. Il s’intéresse aux livres et aux dessins anciens. De 1896 à sa mort, il est le Président du Club des Cent Bibliophiles qui éditera des beaux livres toujours recherchés de nos jours. Nous avons déjà évoqué les publications de cette prestigieuses Société avec  Les Camelots de la pensée, Quais et trottoirs et Fêtes foraines. Eugène Rodrigues sera aussi un membre influent de la Société de reproduction des tableaux de Maîtres, et un grand collectionneur. Sous le nom d’Erastène Ramiro, il publiera des ouvrages sur Félicien Rops et Louis Legrand sur son oeuvre gravé et lithographié. Il meurt à Paris le 19 avril 1928. Sa collection de livres et d’estampes sera dispersée à Drouot en novembre-décembre 1928 et en février 1929.

Louis Legrand (1863-1951), peintre dessinateur et graveur. En 1884, il s’installe à Paris et s’initie aux techniques de la gravure avec Félicien Rops. A partir de 1887, il collabore au Journal Le courrier Français. En 1891, il participe au Gil Blas pour illustrer le numéro spécial consacré au Moulin Rouge. En 1900, il reçoit une médaille de bronze à l’Exposition universelle. La vie nocturne parisienne de la Belle Epoque sera une de ses principales sources d’inspiration.

Si l’ on consulte la table des matières des eaux-fortes de Faune parisienne, on découvre assez vite que le Paris léger et brillant de la Belle Epoque sera célébré dans l’ouvrage : L’éducation d’un faune, Bavardage, Monsieur et Madame Adam, Les Blanchisseuses, Les calicots, Mlle X, dans son cabinet de travail, Confidence, Singerie, Les Amies de Montmartre, l’Ame du poète, Une Poire, Délassement, l’Inspecteur des Beaux-Arts, Petite Mère, Parc Monceau, Militaristes, La Péniche.

Au long des pages l’auteur et l’illustrateur nous conduisent dans le dédale de l’univers féminin parisien. Sous les auspices de Diane à qui l’auteur dédie son ouvrage, nous sommes conduits dans le monde des femmes de la Belle Epoque.

Les jeunes ouvrières sont comparées à des moineaux-francs dédaigneux du reste du monde et s’épanouissant au gré de leurs envies.

Mais il n’y a pas que des volatiles épris de liberté et souvent une cage dorée est la seule ambition des moineaux qui ne sont pas francs.

Pour financer cet abri il faut trouver un protecteur, en fait un singe, un type qui casque et l’auteur nous offre de subtils portraits des femmes entretenues et de leurs protecteurs.

Filant la métaphore naturaliste, Ramiro poursuit avec humour ses investigations animalières « Le second Empire a élevé des cocottes. La troisième République se contente de faire vivre des grues. Ce n’est pas une économie. Les cocottes étaient plus voraces mais les grues sont plus nombreuses… ».

Sans compter la présence des rats qui s’ébatte à l’Opéra et qui suscite bien des convoitise, Ramiro poursuit ses « études » jusqu’à présenter les différentes sortes de nids hébergeant les progénitures des classes sociales du haut en bas de la société.

Il constate aussi que certains oiseaux hésitent à voler. Aisément ceux-là dégénèrent en simples volailles et les maisons closes les accueillent…

Erastène Ramiro nous livre une fine analyse de son temps et en filigrane une critique à peine voilée de ses moeurs.  Au delà de l’apparence brillante d’une époque qualifiée de belle, l’envers du décor méritait aussi de prendre la lumière et de ne pas être caché.

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RAMIRO (E) & Louis LEGRAND. Faune parisienne. Paris, Gustave Pellet, 1901. Un volume in-4 (27 cm x 20 cm), 102 pp.

20 eaux-fortes originales sous serpente imprimée dont 16 en couleurs, une pour la couverture, 9 hors texte, 6 in-texte et 4 en noir et 50 vignettes in-texte.

Notre exemplaire contient une suite en noir des 20 eaux-fortes.

Un des 130 exemplaires numérotés sur vélin d’Arches.

Plein maroquin bleu marine, doublures décorées d’un encadrement en arabesque, gardes de soie moirée bleue. Dos à cinq nerfs, titre doré, ranches dorées. Reliure signée Canape. Etui. Couverture conservée.

Bel exemplaire.

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