Lettre de Pierre-Jules Hetzel à Albert Kaempfen où il évoque des aquarelles de Gavarni qui seront gravées pour la 2e édition du Diable à Paris.

 

Cette lettre manuscrite présente un intérêt particulier par son scripteur Pierre-Jules Hetzel le grand éditeur du XIXe siècle, son destinataire  Albert Kaempfen à l’époque journaliste au Temps, il deviendra par la suite Directeur des Musées nationaux en 1889 et son sujet entre autre l’illustrateur Paul Gavarni.

Pierre-Jules Hetzel (1814-1886). Après avoir étudié le droit, il abandonne rapidement ses études en 1835. En 1837, il fonde sa maison d’édition. Associé avec Paulin, chez qui il travaille un temps, il publie l’Histoire des Français de Théophile Lavallée.  Il rencontre son premier succès éditorial avec « Vie publique et privée des Animaux, études des moeurs contemporaines » (1839-1840) en constituant un groupe d’écrivains dont Balzac, George Sand, Charles Nodier et le dessinateur Grandville. Il rachète les parts de l’éditeur Charles Furne en difficulté financière, pour assurer la  poursuite de la publication de La Comédie humaine. En 1843, il fonde Le nouveau magasin des enfants dont les auteurs seront notamment : Charles Nodier, Tony Johannot, Alexandre Dumas, George Sand, Musset….et les illustrateurs Bertall et Gavarni. Avec ses auteurs de Vie publique et privée des Animaux, il édite Le Diable à Paris. Paris et les Parisiens. Moeurs et coutumes, caractères et portraits des habitants de Paris, tableau complet de leur vie privée, publique, politique, artistique, littéraire, industrielle  (1845-1846). Pour cette édition, il s’adjoint aussi la collaboration de Gérard de Nerval, Henry Monnier, Taxile Delord, Théophile Lavallée ainsi que les illustrateurs Bertall et Gavarni.

Pierre-Jules Hetzel par Nadar.

En 1848, Hetzel devient chef de cabinet d’Alphonse de Lamartine au ministère des Affaires Etrangères puis secrétaire de Cavaignac. Il s’exile en Belgique après le coup d’Etat du 2 décembre où il continue ses activités d’éditeur en publiant clandestinement Les Châtiments de Victor Hugo. Lorsque l’Empire se libéralise, il rentre en France. Il y publie une édition des contes de Charles Perrault illustrée par Gustave Doré. Il créé la revue Bibliothèque illustrée des familles qui devient Le magasin d’éducation et de récréation en 1864. C’est avec Jules Verne qu’il connaît ses plus grand succès d’édition. Sa collaboration avec l’auteur débute en 1863 avec la publication de Cinq semaines en ballon. Hetzel signe avec l’écrivain un contrat de vingt ans. Les histoires de Jules Verne associées à de belles illustrations, avec d’extraordinaires cartonnages rencontrent un large public.

Hetzel n’est pas seulement éditeur, il écrit aussi sous la signature de P.J.Stahl, il contribue sous ce pseudonyme aux Scènes de la vie privée et publique des animaux. Il co-écrit avec Alfred de Musset, Voyage où il vous plaira. Il est aussi l’unique auteur de La Journée de Mademoiselle Lili et de Maroussia…

Sa maison d’édition reprise par son fils (Louis-Jules) sera vendue à Hachette en 1914.

Editeur hardi et innovateur dans son domaine, il participe à l’évolution de la librairie en la faisant passer d’un secteur artisanal à une entreprise industrielle dont le patron est à la fois éditeur, auteur, directeur de collection, directeur commercial, chef de publicité et gestionnaire. Il contribue au succès littéraire de nombreux écrivains. Il mobilise aussi les plus grands illustrateurs de son époque.

Il a publié les savants et les économistes de son temps comme Camille Flammarion, Emile Guimet, Viollet-le-Duc…et donne sa chance aux Communards réprouvés comme Elisée Reclus ou André Lauric. Il diffuse aussi de la littérature étrangère en éditant Goethe, Andersen, Edgar Poe Stevenson, Toltoï, Tourguéniev…

Il créé la couverture illustrée, l’affiche de librairie et d’étrennes, le marketing éditorial. Il garantie aux écrivains des droits d’auteur proportionnés aux ventes selon un système toujours en vigueur aujourd’hui. Il a également révolutionné la mise en page en incrustant l’image dans le texte mais aussi le texte dans l’image.

Albert Kaempfen. Atelier de Nadar.

Albert Kaempfen (1826-1907). Un temps avocat, il abandonne vite la robe pour l’écriture et le journalisme. Il est rédacteur au Temps jusqu’en 1870. Il collabore aussi au Courrier du dimanche, l’Epoque, La Revue moderne, Le Magasin des Demoiselles, La Vie parisienne, Le Courrier de Paris. En 1871, il devient rédacteur au Journal officiel puis inspecteur dans l’administration des Beaux-Arts dont il devient Directeur en 1882. Il est nommé Directeur des Musées nationaux en 1889. La tiare d’Olbia dont il soutient l’achat, se révèle être un faux, éclaboussé par le scandale, il quitte la Direction des musées nationaux en 1904.

Paul Gavarni, auto portrait.

Paul Gavarni (Sulpice-Guillaume Chevalier) (1804-1866), dessinateur, aquarelliste et lithographe. Il publie ses dessins dans le Journal des dames et des modes, l’Artiste et Illustration. A partir de 1835 il devient un collaborateur régulier du Charivari.

Avec Granville, il participe au « Diable à Paris » dont vous pourrez trouver une description de la seconde édition sur le blog.  Ses séries lithographiques et ses dessins en font un des plus fins observateurs de la société parisienne sous Louis-Philippe et le Second Empire.

Notre lettre manuscrite de Pierre-Jules Hetzel sur papier à en-tête de sa maison d’édition (18 rue Jacob), adressée à Albert Kaempfen se présente sur trois pages (un feuillet double plié en deux). Manifestement l’éditeur et le destinataire se connaissent bien puisqu’Hetzel évoque de nombreux sujets artistiques et notamment des aquarelles de Gavarni qui serviront pour la 2e édition du Diable à Paris.

« ….Gavarni était peu sociable très ours, glacial. Il aurait glacé le feu….Il m’a laissé une collection de 200 aquarelles….que je vais faire graver pour une nouvelle édition très renouvelée du Diable à Paris…Cette collection devrait avoir une salle à elle toute seule dans le musée du Louvre…Des amateurs m’en ont offert pas mal de gros sous ce sera pour l’enfouir dans une galerie et je ne vendrai les originaux que quand je les aurais fait graver pour les donner au public à qui elles appartiennent de droit…. » Ces propos sont suivis de diverses considérations artistiques et de remerciements d’Hetzel à Kaempfen pour un article paru dans le Temps. Il est vrai que l’éditeur entretenait les meilleurs relations avec les journalistes pour le développement de ses activités.

La lettre n’est pas datée. Sur le papier à en tête de sa maison d’édition, Pierre-Jules Hetzel n’a pas renseigné le dernier chiffre de la date déjà imprimée 186. Gavarni est mort en 1866. Le premier tome de la 2e édition du Diable à Paris paraît en 1868. L’intervalle est court et la lettre se situe probablement dans cette période.

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Lettre manuscrite signée de Pierre-Jules Hetzel à Albert Kaempfen (A l’époque chroniqueur au Temps). 3 pages sur papier à en-tête de la maison d’édition (18 rue Jacob) sur un feuillet double plié en deux (21 cm x 13,5 cm).

Dans celle-ci, Hetzel évoque longuement des aquarelles de Paul Gavarni qu’il envisage de faire graver pour la 2e édition du Diable à Paris.

La lettre ne comporte pas de date précise, on peut toutefois la situer probablement entre 1866 et 1868.

Intéressant document sur le travail de l’éditeur et la préparation de la nouvelle édition du Diable à Paris.

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