Règlement de la maîtrise des eaux et forests d’Orléans.

 

Aujourd’hui nous nous échappons de Paris pour les grands espaces de la forêt domaniale d’Orléans la plus vaste de France métropolitaine. Elle a une superficie de 50 000 hectares répartis sur 35 communes dont 35 000 hectares de forêt domaniale. Elle comprend trois grands massifs : à l’Est, le massif de Lorris (14 400 hectares), au centre le massif d’Ingrannes (13 600 hectares) et à l’ouest le massif d’Orléans (6 600 hectares).

Forêt royale depuis le Xe siècle mais à la fin du XVIe siècle, la superficie de la forêt détenue par la couronne de France n’est plus que de 39 000 hectares, elle est amputée par les défrichements et les donations au clergé. Très abîmée à la fin du XVIIIe siècle par une surexploitation et par les abus de pâturage, la forêt est classée domaniale en 1848 et elle est reboisée au  XIXe siècle.

Dans le royaume, la législation forestière remonte aux anciennes ordonnances capétiennes de 1318, 1346, 1376 et 1402 remises en vigueur en mars 1516 par François Ier. De nouvelles ordonnances en 1517, 1518 et 1520 ont enrichi la matière. Un édit de Henri II (févier 1555) a réglementé l’organisation administrative des eaux et forêts, une ordonnance de 1583 a précisé la jouissance des droits d’usage. En matière d’exploitation , le règlement des coupes remonte à deux édits de Charles IX (1561 et 1573). Les mesures législative de Henri IV (ordonnances de 1597, édits sur les chasses de 1601 et 1604) sont limitées. Depuis 1610, c’est essentiellement par arrêts du Parlement, du Conseil d’Etat ou du Conseil Privé que se modifie la réglementation.

Les seuls édits promulgués en matière forestière au XVIIe siècle ont plutôt porté préjudice aux forêts royales : l’édit de 1601 organisant la vente des terres  » vaines et vagues aux reins des forêts », l’édit de mars 1619 décidant la vente et le partage entre le roi et les tréfonciers des bois en gruerie, grairie, tiers et danger, l’édit de 1652 autorisant la vente des boqueteaux ou buissons détachés des forêts royales.

1315194-Jean-Baptiste_ColbertLes réformes s’imposent donc au début du règne de Louis XIV. Colbert estime que deux buts sont à atteindre : 1° le rétablissement, 2° la conservation des forêt. Ces objectifs ne peuvent être obtenus que par une application stricte des anciennes ordonnances complétées par de nouvelles mesures administratives. Pour cela, il convient d’établir un nouveau règlement des coupes, la réduction des usages, la suppression des officiers inutiles, l’établissement de bons et utiles officiers. C’est sur cette base que la grande ordonnance forestière de 1669 constitue la charte de toutes les forêts jusqu’à la Révolution française.  Financièrement la réformation est une opération payante. Elle a coûté très cher, plus de 1 270 000 livres mais cette dépense est largement remboursée par les amendes auxquelles ont été condamnés les officiers, marchands et particuliers qui s’élevèrent à au moins 2 millions de livres.

La réformation des forêts du duché d’Orléans est entreprise que très tard. L’administration du duché d’Orléans est devenue très indépendante depuis la constitution de l’apanage pour Gaston d’Orléans et prétend contrairement à la loi, que le domaine d’Orléans n’est plus pour ainsi dire royal. Le réformateur Lallement de l’Estrée, dès qu’il est à pied d’oeuvre, se plaint des abus formidables qui ses sont introduits à tous les degrés de la hiérarchie forestière. Le 4 septembre 1669, L Estrée est désigné pour réformer les forêts du duché d’Orléans. Il essaye de faire appliquer la nouvelle ordonnance des forêts d’août 1669, tant dans les bois royaux ou apanages que dans ceux des ecclésiastiques, communautés laïques et gens de mainmorte.

EAUX ET FOREST 1EAUX ET FOREST 2L’ordonnance de 1669 recommande particulièrement de ne faire à l’avenir aucune concession de bois d’usage, à chauffer ou à bâtir, et annulait même tous les anciens titres. L’Estrée supprime sans compensation un grand nombre d’usages dans la forêt d’Orléans : tous les usages au bois-mort, puis les usages plus importants dont jouissaient les seigneurs et les paroisses. Lallement de l’Estrée est l’auteur de ce règlement des droits d’usage (15 avril 1671), il n’eut pas le temps de rédiger le règlement des pâturages qui fut élaboré le 12 septembre 1675 par Louis de Ménars. Ménars se montre très généreux à la demande de Colbert lui-même. Liberté fut donnée à toutes les paroisses qui le demandèrent d’envoyer paître en tout temps et par toute la forêt  » leurs bêtes aumailles » dans les coupes ayant quatre ans et un mois, et leurs chevaux dans celles de trois ans, des concessions de terres vagues furent accordées, malgré l’ordonnance, pour le parcours des bêtes blanches (les moutons).

Un second acte de la réformation consiste dans le règlement général des coupes. En 1671, l’Estrée constate qu’il ne reste plus dans la forêt d’Orléans aucune haute futaie. Cette situation n’est pas seulement le fruit d’abus généralisés, mais bien le résultat du règlement local de 1627 qui avait prescrit le traitement de la forêt d’Orléans en haut taillis. Les réformateurs estiment que le cinquième, au moins, des bois du roi, soit plus de 12 000 arpents, est en landes ou bruyères. Les bois des tréfonciers sont encore en plus mauvais état : leur situation misérable remonte souvent à l’époque des guerres de religion où beaucoup de forêts ecclésiastiques ont été durement mises à contribution.

La réorganisation complète de l’administration forestière est faite pendant le même temps. Le duché d’Orléans comprend trois maîtrises. La connaissance des crimes commis dans le bois est enlevée aux forestiers. La juridiction forestière de tous les maires, de tous les tréfonciers ecclésiastiques est définitivement supprimée, et les profits de la justice appartiennent désormais entièrement aux rois.

Ces informations historiques proviennent d’une étude rédigée par M.Deveze  » La grande réformation des forêts royales sous Colbert (1661-1680) » in Annales de l’Ecole nationale des eaux et forêts, tome XIX, Fascicule 2, 2e trimestre 1962.

forest 10Il est intéressant de parcourir le règlement de la maîtrise, eaux & forest d’Orléans contenant les Ressorts, Fournitures, Gages, Droits & chauffage des Officiers du Siège principal d’Orléans où l’on découvre la précision d’une administration déjà forte au XVIIe siècle. La définition d’un périmètre d’intervention, les pouvoirs dévolus aux officiers, la hiérarchie précise de l’organisation, les usages et chauffages, les appointements, les ventes de bois, la police particulière de la forest, les paturages, les chasses, la pêche…

J’imagine ce petit opuscule dans la poche d’un officier du roi qui parcourait à cheval les belles allées cavalières de la forêt et qui veillait à appliquer le nouveau règlement de la maîtrise des eaux et forests d’Orléans. La modestie de sa couverture en vélin bien polie laisse supposer un usage régulier et puis il a dû être laissé dans un bureau avant de rejoindre votre bibliothèque….

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forest 11Règlement de la maîtrise des eaux et forests d’Orléans contenant les Ressorts, Fournitures, Gages , Droits & Chauffage des Officiers du Siège principal d’Orléans. Avec une instruction nécessaire à tous les Officiers de chaque ressort de la Forest, & à tous les Marchands, ce qu’ils doivent observer dans leurs Ventes, même les particuliers qui y ont interest. Le tout arresté par ordonnance de Monseigneur de Lestre, grand Maîstre des Eaux & Forests. A Orléans le 18 Avril 1671. signé de sa mains : et plus bas Barbot Greffier. Orléans, chez Jean Borde, seul Imprimeur du Roy; & du collège Royal, au cloître des RR PP.Jésuistes, à la couronne d’Or, 1684. Une plaquette in-16 (15 cm x 9 cm), 45 pp.

Sous couverture vélin.

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