Auguste Friedrich Ferdinand von Kotzebue (1761-1819), romancier et dramaturge allemand séjourne à deux reprises à Paris en 1790 et en 1804. De ce deuxième voyage, il tire un récit qui fait grincer des dents les parisiens.
Auguste von Kotzebue commence par entreprendre des études pour devenir avocat. Puis il devient secrétaire du gouverneur-général de Saint-Pétersbourg et est nommé assesseur à la Haute Cour d’appel de Reval. Il est par la suite président de la magistrature de la province d’Estland. A partir de 1785, il publie de nombreux romans. Sa première femme disparue, il quitte le service de la Russie et réside pendant un temps à Paris puis à Mayence. A partir de 1795, il s’installe près de Reval (aujourd’hui Tallinn, Estonie) et se consacre à l’écriture. Il publie des volumes historiques et des pièces de théâtre.
En 1798, il prend la fonction de dramaturge à la cour de Vienne dont il démissionne rapidement. Il retourne s’installer dans sa ville natale, Weimar. Attaquant ouvertement le romantisme, Goethe réside à Weimar, il préfère repartir en Russie où le tsar Paul Ier le nomme directeur du théâtre allemand de Saint-Pétersbourg.
A la mort du tsar, il retourne à nouveau à Weimar où il n’est toujours pas accepté par la société littéraire. Il se tourne alors vers Berlin et voyage notamment à Paris. A la fin 1806, il s’installe à nouveau en Russie et écrit dans les journaux, des articles satiriques contre Napoléon. Conseiller d’Etat. En 1816, il est attaché au département des affaires étrangères à Saint-Pétersbourg et se rend en 1817 en Allemagne pour espionner au service de la Russie.
Ses opinions ouvertement réactionnaires provoquent l’aversion générale parmi la population allemande. Un jeune étudiant, Karl Sand, membre d’une société pour les libertés civiques, l’assassinera en mars 1819. Cette issue tragique inspira en partie Dumas et Nerval pour le drame Léo Burckart (1839).
Outre ses romans et pièces de théâtre qui le rendent populaire tant en Allemagne qu’en Europe, Auguste von Kotzebue rédige des récits autobiographiques sur ses voyages : Meine Flucht nach Paris im Winter 1790 (1791), Uber meinen Aufenthalt in Wien (1799), Das merkwürdigste Jahr meines Lebens (1801), Erinnerungen aus Paris (1804), dont nous allons parler ci-dessous et Erinnerungen von meiner Reise aus Liefland nach Rom und Neapel (1805).
Ainsi Kotzebue revient à Paris en 1804 après son premier séjour de 1790 et nous découvrons sous une plume étrangère la vie parisienne de l’époque. Il est comme d’autres voyageurs, anglais cette fois, surpris par l’enchaînement des événements. Nous les avons déjà présenté dans plusieurs pages précédentes du blog L.Tronchet. Picture of Paris. John Scott. A visit to Paris in 1814, John Moore. A Journal during a residence in France from the beginning of august to the middle of december 1792, Th.Holcroft. Travels from Hambourg through Westphalia, Holland and the Netherland to Paris.
Toute l’Europe était sidérée par la Révolution française et l’ouvrage de Kotzebue traduit ce sentiment dans ses souvenirs grinçants sur la vie parisienne.
Selon Tulard, « Ces féroces impressions d’un voyage à Paris provoquèrent l’indignation des habitants de la capitale » Indignations partagées par le traducteur (Guilbert de Pixérécourt) qui au début de l’ouvrage dans « Deux mots à M.Kotzebue par le traducteur en matière de dédicace » prend la liberté d’ajouter vingt pages à sa traduction et des notes nombreuses en bas de page pour réfuter les positions de l’auteur. « Je vous fais donc hommage des Souvenirs de Paris traduits en français; certes c’est un cadeau bien mince, mais j’aurai rempli mon but, si les notes dont je les ai augmentés vous font faire quelques réflexions sur votre conduite envers nous, et si sur-tout elles détruisent, ou atténuent du moins, la mauvaise impression que vos critiques inconsidérées et indécentes ont pu produire sur quelques esprits faibles, sur ces hommes qui croient aveuglément et sans restriction tout ce qu’on leur dit, parce qu’ils sont hors d’état d’avoir une opinion à eux… » L’indignation était partagée au plus haut sommet de l’Etat puisque la censure impériale avait exigé la suppression de tous les exemplaires, du chapitre consacré au Premier Consul et ses alentours.
Kotzebue raconte le Paris du Consulat et nous offre un panorama fort intéressant sur l’époque que l’on peut bien entendu tempérer avec les notes du traducteur ou simplement prendre le recul nécessaire. Un aristocrate allemand ne pouvait regarder avec bienveillance une société nouvelle à laquelle il était étranger.
Quoiqu’il en soit en parcourant les différents chapitres de l’ouvrage, nous découvrons le Paris post révolutionnaire et apaisé sous le Consulat.
Tome premier : Les rues de Paris décrites en quatre Lettres à une dame, Ma Présentation aux trois Consuls, Sur Madame Récamier, Le Muséum des Monumens français, Musée-Napoléon (galerie des Tableaux, Galerie des Dessins, Galerie des Antiques, Statues, Bustes et Bas-reliefs), Moeurs et Usages des Parisiens (Le Boire et le Manger, L’Habillement, Tentative pour le Mariage, Les Filles de joie, et tout ce qui s’en suit)
Tome second : La Vallée de Montmorency et l’Abbaye de Saint-Denis, Le Cabinet des Antiques, Le Courrier de Paris, Justice criminelle, Disposition d’esprit des Parisiens, Sociétés et Plaisirs, Quelques grands Peintres, et leurs Ateliers, Choses qui méritent d’être vues (Le Monument de Desaix, les chevaux de conquête, Le Jardin des Tuileries, La Manufacture des Gobelins, la Pompe à feu, La Manufacture des frères Perrier, La Manufacture des Glaces, la Bastille, Le Cabinet de Physique du professeur Charles, L’Hôtel-Dieu, l’Hospice de la maternité, La Pitié, La Maison de Sainte-Perrine, L’Hôtel des Monnaies, l’Ecole de médecine, l’Ecole-Vétérinaire à Charenton, l’Institut des Quinze-Vingts, Le Prytanée, l’Ecole-Polytechnique, l’Athénée de Paris, l’Athénée des Etrangers, la Bibliothèque de l’Arsenal, La Bibliothèque-Mazarine, l’Observatoire, Une superbe Collection de machines et de Modèles, Le Panstérorama, Le Cabinet d’Estampes, L’Eglise-Saint-Sulpice, le Palais-Royal, Le Palais du Sénat-conservateur (ci-devant Palais du Luxembourg), La Salle des Cinq-Cents, L’Hôtel des Invalides, Le jardin des Plantes), Le faux Dauphin, Galerie des tableaux de Lucien Bonaparte, Galerie des Manuscrits, L’Institut des Sourds-Muets, Théâtre (Théâtre-Français, Académie de Musique, Opéra-Buffa, Théâtre-Feydeau, Théâtre Louvois, Théâtre du Vaudeville, Théâtre Montansier, Théâtre de la Porte Saint-Martin, Théâtre de l’Ambigu-Comique, Théâtre de la Cité, Théâtre de la Gaieté, Théâtre Olympique, Théâtre Molière, Théâtre des Jeunes-Artistes, Théâtre du Marais, Théâtre de l’Ecole-Dramatique, Théâtre des Petites-Variétés du Palais-Royal, Notes tirées de mes Tablettes, mélanges et remarques diverses. Lettres d’une dame de Paris à une dame de province, contenant quelques particularités du séjour de M.Kotzebue à Paris.
A l’exception des pages de titre, les illustrations de cette page proviennent d’autres ouvrages que celui présenté.
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KOTZEBUE (Auguste von). Souvenirs de Paris en 1804. Traduits de l’Allemand, sur la deuxième Edition avec des notes. Paris, chez Barba, Libraire, Palais du Tribunat, Galerie derrière le Théâtre Français, n°51. Imprimerie de Chaignieau aîné. An XIII (1805). Deux tomes en un volume in-12 (17,5 cm x 10,5 cm), VI-XX-316-378 pp.
1/2 veau d’époque (quelques légers frottements). Filets dorés sur le dos, pièce de titre. Tranches bleutées.
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