Si vous en avez l’occasion n’hésitez pas à vous rendre dans l’Ile de la Cité le dimanche matin. Le marché aux fleurs et aux oiseaux offre un ravissant dépaysement coloré et sonore. Des marchands déposent leurs cages pleines d’oiseaux rares et les graines les plus variées sont proposées pour nourrir les becs affamés. Les badauds repartent parfois avec des volatiles dans de petites boîtes en carton ou se contentent d’admirer les plumages ou d’écouter les chants de quelques uns.
Le canari est plutôt bien représenté parmi tous ses oiseaux et en plus certains d’entre d’eux sifflent fort bien. De nos jours, il est devenu commun mais il était encore rare au XVIIe siècle et faisait l’ornement des demeures princières avant de progressivement se démocratiser.
A partir du XVIIe siècle, le serin vert devient un produit commercial. Un événement imprévu bouleverse l’exclusivité des Espagnols dans le commerce des serins. Un navire espagnol qui a à son bord un grand nombre de ces serins verts vogue en direction de Livourne. Il est pris dans une tempête et se fracasse sur les rochers de l’ïle d’Elbe. Les serins libérés cherchent refuge sur l’île. Ils retrouvent une nourriture et un environnement adaptés à leurs besoins. Ils nichent et se reproduisent, leur adaptation est aisée et les habitants les capturent les exportant dans tous les pays du monde particulièrement en Europe où on ne connaît alors que le serin verdâtre que transportent les colporteurs.
De façon innatendue, les oiseaux importées des îles Canaries se reproduisent sans aucune difficulté en cage sans qu’il y ait de la part de l’homme une maîtrise quelconque d’un savoir scientifique C’est ainsi que naissent des souches spécifiques acclimatées à la cage.
A la fin du XVIIe siècle, la maîtrise de la détention amène sur le marché de nombreux oiseaux issus de la cage. La première conséquence est une baisse du coût de l’oiseau et il devient bon marché accessible à une clientèle plus importante. L’oiseau de cage se popularise. Le commerce des oiseaux s’exercent à Paris au Pont au change. Les oiseliers se spécialisent dans les espèces » canaris » et « papagais ». Ils doivent exposer leurs oiseaux de dix heures du matin jusqu’à midi sur la pierre de marbre dans la cour du Palais les jours d’entrée du Parlement, afin que maîtres et gouverneurs de la volière du Roi ainsi que les conseillers et présidents puissent choisir des oiseaux en priorité.
Si l’on doit aux Espagnols d’avoir introduit le serin vert, ce sont les Allemands à la suite des habitants de l’Ile d’Elbe qui les premiers se sont adonnés à la domestication du serin-canari. Les canaris élevés sont exportés vers la France, la Turquie, la Russie, la Belgique, la Hollande et l’Angleterre.
Les canaris sont d’autant plus attractifs qu’ils chantent bien. L’aristocratie et la grande bourgeoisie désireuses de satisfaire son goût de l’exotisme à la mode aux XVIIe et XVIIIe siècles s’intéressent à ces oiseaux. Des « cabinets » sont ouverts à l’initiative du Roi de France pour tenter de garder en cage des oiseaux vivants.
Ainsi ces jolis volatiles égayent les belles demeures et c’est le gouverneur des serins de la Princesse de Condé, Mr Hervieux de Chanteloup qui nous livre les secrets pour soigner ces oiseaux. Il propose un véritable guide balayant tous les sujets permettant d’entretenir une volière de qualité comme celle dont il avait la charge. Manifestement ce guide a abondamment servi et souffert de manipulations successives. Les conseils prodigués semblent encore tout à fait adaptés pour des ornithologues contemporains comme vous allez pouvoir en juger à la lecture de la table des chapitres.
Ch. I. De l’origine du Serin, Ch. II. Les nom que l’on donne aux Serins selon leurs différentes couleurs, Ch. III. Des cages & Cabanes propres aux Serins, Ch. IV. Le temps d’accoupler les Serins, lorsqu’on veut en avoir de la race; et la fixation du lieu la plus avantageuse, Ch. V. La manière certaine d’apparier les Serins, pour en avoir de belles espèces en couleur, Ch.VI. Les choses nécessaires pour faire les Nids des Serins, Ch. VII. Les différentes nourritures qu’il faut donner aux Serins, lorsqu’ils sont accouplez, lorsqu’ils ont des Petits, & lorsqu’ils sont en Cage, Ch. VIII. Différentes Pâtes pour nourrir les Serins à la brochette, Ch. IX. Les heures qu’il faut soigneusement observer pour donner la becquée aux Serins, lorsqu’on désire les élever à la brochette, Ch. X. En quel temps l’on peut connaître les mâles serins d’avec leurs femelles, & les jeunes d’avec les vieux, Ch.XI. En quel temps,& de quelle manière il faut mettre les Serins lorsqu’on veut les instruire au Flageolet, Chap.XII, Des différens tempéramens & génies des Serins,Chap.XIII. Des fâcheux événemens qui arrivent aux Serins lorsqu’on les met couver, Chap.XIV. De la manière de mettre plusieurs Serins femelles avec un mâle, Chap. XV.Combien une femelle peut pondre d’oeufs dans une année; & à quoy on les connoit, lorsqu’ils sont bons, Chap. XVI. En quelle occasion une femelle fatigue le plus, lorsqu’elle pond, lorsqu’elle couve, ou lorsqu’elle nourrit, Chap.XVIII. Recueil de quelques remèdes singuliers pour soulager les Serins dans leurs Maladies, Chap.XIX. Autres Infirmitez des Serins, avec les Remèdes pour les guérir, Chap.XX. Quelles espèces d’Oiseaux on peut apparier avec les Serins, & des Mulets qui en sortent, Chap. XXI. Pourquoi les Serins que les Suisses nous apportent ici, périssent presque tous, peu de temps après qu’on les a achetez, Chap. XXII. L’avantage qu’il y a d’élever les Serins à la brochette; & les raisons qui doivent faire préférer les premières & secondes couvées aux dernières, Chap. XXIII. Du prix courant que valent présentement les serins en cette Ville, Chap.XXIV. Les noms, les qualitez, & le prix de plusieurs Graines différentes que l’on donne communément aux Serins pour leur nourriture ordinaire, Chap.XXV. De l’usage que l’on doit faire des Serins, & le temps qu’ils peuvent vivre, lorsqu’ils sont bien gouvernez.
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HERVIEUX. Nouveau traité des serins de Canarie, contenant La manière de les élever, les apparier pour en avoir de belles races, avec des remarques aussi curieuses que nécessaires sur les signes & causes de leurs Maladies, & les Secrets pour les guérir. Dédié à Son Altesse Sérénissime Madame La Princesse. Paris, Claude Prudhomme, 1709. Un volume in-12 (17,5 cm x 10 cm), 4 (Dédicace)-4 (Avertissement)-2 (Stances)-Approbation et privilège (3)-Table des chapitres (5)-326 pp.
2 planches : Prélude, Marche des Surlobes et Modèles de cages.
Première édition.
Basane marbrée. Dos à cinq nerfs, caissons décorés, pièce de titre. Tranches mouchetées. Reliure avec accidents : Coiffes usées avec manques, manque au dos, charnières fendues.
Vendu.
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