L’histoire des quatre fils Aymon est une chanson de geste qui a été transcrite dans la littérature médiévale à partir du XIIe siècle. Cette légende d’origine française se diffuse sous des versions variées dans de nombreux pays européens, en Belgique, en Italie, en Allemagne et dans les Flandres après l’invention de l’imprimerie et connaît de multiples impressions de la Renaissance jusqu’au XIXe siècle.
Elle met en scène quatre preux chevaliers, Allard, Renaud, Richard et Guichard. A la cour de Charlemagne, Renaud tue le neveu de l’Empereur. Les quatre frères s’enfuient, poursuivis par les soldats de Charlemagne, ils se réfugient dans la forêt des Ardennes et doivent leur salut à leur cheval fantastique Bayard et à l’enchanteur Maugis. Leur père, vassal de Charlemagne, refuse de les protéger, ils partent alors en Gascogne et résistent à l’Empereur. Charlemagne finit par négocier la paix avec les fils Aymon mais demande la remise du cheval Bayard et exige la réalisation d’un pélerinage à Jérusalem par Renaud. Jeté dans la Meuse le cheval réussit à s’enfuir dans la forêt ardennaise. La Chanson se termine sur le martyre de Renaud assassiné pendant la construction de la cathédrale de Cologne.
Cette belle légende a traversé les siècles. Le roi Charles V fait réunir toutes les anciennes épopées françaises et les fait traduire dans la langue de son temps. Ce sont ces traductions qui par la suite à la Renaissance sont à nouveau adaptées en langue de l’époque.
Le texte retenu pour cette édition est celui établi par Jean Oudot, imprimeur-libraire troyen et créateur d’une collection de livres populaires (La Bibliothèque bleue). Presque tous les anciens romans de chevalerie refondus et rédigés en langage moderne se trouvent dans cette collection et le premier qui figure en tête du Catalogue de la Vve Oudot, en 1665 est l’Histoire des quatre fils Aymon. Les textes préparés et publiés par Oudot avaient passé aux Garnier, autres imprimeurs-libraires de Troye. C’est sur un exemplaire publié en 1726 par Pierre Garnier que le texte de la présente édition a été établi.
Ce texte ancien allait avec les nouvelles techniques d’impression de la fin du XIXe siècle, connaître une nouvelle célébrité. Lors de sa parution Octave Uzanne le considérait comme « le plus beau livre du siècle ». C’est un exemple de référence du nouveau livre de luxe qui associe prouesse technique et émergence d’un nouveau style bibliophilique.
Disciple de Violet le Duc, Eugène Grasset mis plus de deux ans à dessiner les planches des quatre fils Aymon. Cet artiste d’origine suisse (1845-1917) commence par étudier le dessin avec François Brancion puis l’architecture au Polytechnicum de Zurich. En 1869 et 1870, il travaille comme peintre sculpteur à la décoration du théâtre de Lausanne. Il s’installe à Paris en 1871 et oeuvre comme designer industriel. A partir de 1877, il travaille exclusivement dans le graphismes des livres illustrés (Les quatre fils Aymon), de tissus, de papiers peints, de mosaïques, de vitraux religieux et profanes, de lithographies et d’affiches. En 1890, il dessine le célèbre logotype de la Semeuse pour les éditions Larousse. En 1898, pour la fonderie G.Peignot, il créé le caractère d’imprimerie qui est présenté lors de l’Exposition Universelle de 1900. De 1890 à 1903, il enseigne le dessin d’art industriel et la composition décorative dans diverses Institutions parisiennes. Ses travaux s’exportent aux Etats Unis où il est considéré comme un des artistes majeurs de l’Art Nouveau français.
Pour les quatre fils Aymon, Eugène Grasset est le premier à utiliser une technique de gravure chimique en relief mise au point par Charles Gillot quelques années plus tôt. Ce procédé permet d’imprimer ensemble textes et illustrations de plusieurs couleurs ce qui constitue les débuts de la photogravure.
L’illustration de l’ouvrage est d’une spectaculaire richesse, motifs architecturaux, costumes, armes sont finement dessinés. L’influence du japonisme se retrouve dans les illustrations, la composition et les titres. La mise en page est novatrice, les cadres débordent, les plans se superposent. Ces choix novateurs pour l’époque font considérer l’ouvrage comme un véritable manifeste de l’Art nouveau en bibliophilie.
Boudé à sa sortie, le tirage courant fut en partie détruit, l’ouvrage fut néanmoins reconnu rapidement par les bibliophiles qui choisirent les meilleurs artistes du temps pour lui donner la reliure qu’il méritait.
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GRASSET (Eugène). Histoire des quatre fils aymon. Très Nobles et très Vaillans Chevaliers. Paris, H.Launette, 1883. Un volume in-4 (28,5 cm x 23,5 cm), 224 pp et 8 ff n.ch. (notes, table des matières et achevé d’imprimer).
Compositions en couleurs par Eugène Grasset. Gravure et Impression par Charles Gillot. Introduction et Notes par Charles Marcilly. Texte inséré à chaque page dans une illustration en couleurs avec bordure décorative. Plusieurs illustrations en couleurs à pleine page dont les têtes de chapitre.
Plein maroquin havane (Reliure de Paul Vié). Dos à 5 nerfs, tranches dorées. Filets dorés sur les coupes. Roulettes intérieures dorées. Couvertures conservées.
Vendu.
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